Comment faire reconnaître que les travailleurs de l’ombre sont en fait des agents de lumière ? Telle pourrait être la synthèse de l’intervention de Philippe JOUANNY, le Président de la Fédération des Entreprises de Propreté (FEP), lors du séminaire « Economie & Sens » de l’Ecole de Paris du Management.
Des faits, des actes, pas de bla-bla !
Depuis 2008, la FEP s’est engagée dans une démarche sectorielle RSE. Plus de 2.000 des 13.000 entreprises de propreté se sont saisies de la dynamique collective pour mettre en œuvre tout ou partie des 51 actions identifiées pour progresser dans les domaines environnementaux, sociaux et sociétaux.
Les résultats sont très concrets. La Fédération a en effet travaillé avec ses fournisseurs pour inventer et/ou faire adopter de nouveaux produits. De la réduction des produits chimiques à l’usage de Cybots, qui associent la technologie à l’action des salariés pour en faciliter le travail, les avancées sont notables. Un exemple pour une PME d’Ile-de-France : la réduction significative de chiffons grâce à la microfibre, de 1 tonne à 150 kilos par mois.
Ces résultats sont d’autant plus remarquables que les 550 000 salariés du secteur sont principalement employés dans des TPE et des PME. C’est collectivement que le secteur se mobilise pour leur permettre de progresser. Dans ce milieu très concurrentiel, la RSE est source de « jouer collectif ». Valoriser leur profession est un objectif commun. Les grandes entreprises du secteur ont été volontaires pour aider les Fédérations Régionales, qui constituent la Fédération Nationale, à inventer ensemble une démarche qui soit adaptée aux spécificités du métier.
12 ans après le lancement de la démarche RSE, les impacts collectivement obtenus sont la preuve de l’efficacité de ce choix. Symbole fort qu’il convient de souligner, les entreprises se sont imposé conventionnellement une contribution obligatoire de 0,15% de la masse salariale pour investir dans la formation des jeunes, les démarches RSE, la lutte contre l’illettrisme et la R&D sectorielle. A titre d’exemple, cela a permis de former 380 000 salariés en 5 ans.
Ces TPE et PME sont le creuset de ce que l’on a appelé les « travailleurs de la 2éme ligne ». Ce sont eux qui, au plus fort de la crise sanitaire, ont accepté d’aller nettoyer les salles d’opérations, les chambres des malades, les EHPAD, les transports publics… Moins visibles que les soignants et les caissiers, ils ont pourtant joué un rôle tout aussi important dans la lutte contre la COVID 19. Alors oui, il s’agit bien d’agents de lumière dont il faut reconnaître la valeur souvent mise « sous les radars » !
Un autre symbole fort : 95% des dirigeants d’entreprise des 13 000 TPE et PME du secteur proviennent du terrain. Un véritable « escalier social » comme l’a déclaré avec humour Michel BERRY : « l’ascenseur, c’est trop facile, là vous nous parlez d’un véritable chemin de progrès ».
Alors tous ces efforts qui ont permis de créer 100 000 emplois en 10 ans sont-ils valorisés ? C’est sans doute là où le progrès est le plus à attendre. Dans les appels d’offre publics et privés qui tiennent compte de la RSE, ce critère correspond en moyenne à 5% de la note là où le prix représente encore 65% de la note. « La propreté est une variable d’ajustement du budget » déclare le Président de la FEP. Il regrette l’incohérence entre certains grands discours sur la RSE et la capacité réelle à donner une « prime à l’engagement » aux entreprises qui réinvestissent dans un impact social et environnemental.
La FEP en est la preuve par exemple. Lorsque l’on constate que l’achat public représente 25% des 16 Milliards d’euros de chiffres d’affaire du secteur, que ce dernier ne marge qu’à 3% net, et qu’en janvier une baisse de 10% du coût de ses prestations a été unilatéralement décidée sous prétexte de formule de calcul de révision des coûts, il est clair que l’Etat se doit à une exemplarité qui reste encore à construire. Il en est conscient, et le rôle structurant du Médiateur des entreprises qui agit depuis 10 ans pour lutter contre ces incohérences, en est une illustration. A l’heure où ce dernier vient de remettre à la Secrétaire d’Etat chargé de l’Economie sociale, solidaire et responsable un rapport d’évaluation sur le label Relations fournisseurs et achats responsables (RFAR) pour son déploiement, gageons qu’à l’avenir les efforts des TPE et PME à la manœuvre seront mieux récompensés.
D’ici là, ressortons nos casseroles que nous avons su utiliser durant des mois pour rendre hommage aux « premiers de corvée » pour rendre hommage appuyé aux 550 000 femmes et hommes qui, chaque jour, nous rendent la vie plus propre … et plus saine à un moment où nous avons redécouvert l’importance de l’hygiène pour tous !
Pour aller plus loin, consultez :
- La nouvelle stratégie de la FEP intégrant les ODD, confirmant son engagement exemplaire
- La remise le 31/03 du rapport évaluation du label Achats Responsables par le Médiateur des Entreprises Pierre Pelouzet à la Secrétaire d’Etat Olivia Grégoire