Dans un contexte socio-économique et budgétaire contraint, que font les banques face aux besoins des acteurs, actions et alliances d’intérêt général ? Alerté par différents cas de dérives, Le RAMEAU vient de saisir le Médiateur des entreprises. Mise en perspective d’une responsabilité collective à laquelle chacun doit se plier si nous voulons réussir ensemble les transitions…
La Tribune Ensemble, créons de la valeur en « Commun(s) », et la Gazette de l’ODD 17 bilan et perspectives de l’Action en « Commun(s) » ont placé l’année 2025 sous le signe de l’Action concrète au plus près des réalités de terrain. En pratiques, comment sécuriser que l’équilibre socio-économique soit à la hauteur des enjeux adressé ? C’est le sens du nouveau cycle de webinaires mensuels « Impacts & Trajectoires socio-économiques » à suivre sur la plateforme Trajectoires socio-économiques. Il a été introduit par le webinaire du 16 janvier dernier (à voir en replay).
Les temps sont difficiles pour tous. Chaque personne, organisation et Territoire est soumis à des contraintes de plus en plus fortes qui l’oblige à revoir son modèle socio-économique pour s’adapter, tant sur le court terme que sur le moyen terme. Les travaux de recherche empirique du RAMEAU ont permis de qualifier les conditions nécessaires à l’accélération des transitions qui structurent notre avenir en « Commun(s) ». Les méthodes sont aujourd’hui largement partagées, notamment au travers de la plateforme « Piloter l’innovation sociétale ».
Approche systémique de l’économie de l’alliance
Dans son article « Fragilités sociales, évitons la triple peine ! » » du 11 février dernier, Le RAMEAU soulignait l’urgence de prendre en compte une triple « double peine » : celle des personnes, des Territoires et des organisations. En effet, les plus vulnérables sont souvent soumis à une double contrainte à la fois pour faire face à leurs fragilités, mais aussi dans des conditions socio-économiques défavorables. Paradoxalement, le coût d’accès aux services sont en effet plus difficiles et souvent plus chers pour les acteurs en fragilité que pour les autres. Il en va ainsi des personnes (cf. étude 2023 de l’Action Tank Entreprises & Pauvreté), mais aussi des « petits & moyens » Territoires faiblement dotés en ingénierie (cf. rapport du programme « Chef de projet innovation territoriale » de la Fondation des Territoires), et des organismes d’intérêt général (cf. avis du CESE « Renforcer le financement des associations : une urgence démocratique »).
Face à cette situation, l’effort de chacun est un impératif. C’est ce qu’a éclairé l’Agenda 2030 des Objectifs de Développement Durable. La France a signé, avec l’ensemble des 193 Nations Unis, le 25 septembre 2015. Une décennie plus tard, il est urgent d’Agir concrètement !
L’effort de tous est mesurable
Les 10 ans de la signature de l’Agenda 2030 correspond aussi à l’anniversaire décennal de deux publications françaises : le rapport « Intérêt général : nouveaux enjeux, nouvelles alliances, nouvelle gouvernance » et le référentiel « Modèle d’investisseur sociétal ».
Pour en mesurer les effets, l’étude d’impact 20178-2022 a permis de qualifier, de mesurer et d’illustrer les impacts des pratiques partenariales sur la performance, l’innovation et la confiance.
Depuis une décennie, les avancées sont notables même si le rythme n’est pas suffisant face à l’accroissement des fragilités. L’effet ciseau entre la rapidité du développement des fragilités et la raréfaction des ressources exige de chacun une réelle exemplarité. Le cahier de recherche « ODD 17 : quelles trajectoires territoriales ? » invitait en octobre dernier à mobiliser toutes les énergies et les engagements.
Le devoir d’exigence et d’exemplarité des banques est impératif
Dans un cap et un cadre communs, il est essentiel d’analyser le positionnement et les pratiques de tous les profils d’acteurs. Celui des investisseurs sociétaux a été valorisé en janvier dernier (cf. dossier trimestriel du bulletin de veille et de capitalisation de l’innovation sociétal), mais qu’en est-il des banques ?
Dès 2016, le rôle spécifique des banques et services financiers a été mis en valeur dans une table ronde lors du Forum Mondial Convergences. En 2018, les 200 ans des Caisses d’épargne ont été l’occasion de souligner la place que ces dernières avaient joué dans l’émergence des grandes avancées sociales (cf. Récit des 200 ans rédigé par Le RAMEAU). En 2019, dans le référentiel « Modèles socio-économiques d’intérêt général », le laboratoire de recherche décrypte leur modèle socio-économique comme l’un des 7 fondements de l’écosystème français.
L’impact des banques sur l’intérêt général est considérable. N’oublions pas notre histoire en Commun(s) : la crise de 2008. A cause de la spéculation bancaire avec les Subprimes, 20 points d’endettement privé ont été transformés en endettement public pour sauver les banques. La préservation de l’économie mondiale a très largement aggravé la charge de la dette des Etats. Les effets collatéraux sur le financement des actions d’intérêt général ont été considérables, et les acteurs d’intérêt général ont été très largement pénalisés alors qu’ils ont été des amortisseurs des crises induites par la spéculation bancaire. Dès 2015, Le RAMEAU rappelait les dérives du DAILLY, et des difficultés de trésorerie liées aux politiques publiques.
Au moment où la CSRD est questionnée, les banques françaises ont plus que jamais l’exigence de montrer l’exemple pour ne pas (ré)enclencher la spirale infernale qu’elles ont elles-mêmes provoquée dans les années 2000.
Pourquoi se questionner sur la position des banques aujourd’hui ?
Certaines banques ont su parfaitement tirer les leçons des erreurs passées, et inscrire cette exigence collective dans leur stratégie, notamment lorsqu’elle est dans leur ADN ; mais toutes sont-elles au rendez-vous de l’Histoire ? Malheureusement non !
Dans le contexte actuel, certaines banques ne jouent pas collectif. Certes certaines peuvent elles-mêmes être en difficulté, mais ce n’est pas une raison pour « faire payer » – une fois encore – les acteurs d’intérêt général.
Soyons concrets : que les banques soient réticentes à ouvrir des lignes de crédit dans une période difficile peut se comprendre, même si ce n’est pas l’image qu’elles renvoient à grand renfort de communication. En revanche, qu’elles ferment la capacité de développement des acteurs d’intérêt général en les privant des moyens de développement, notamment pour financer leur BFR est purement inacceptable.
Dans ces conditions, Le RAMEAU a saisi le Médiateur des entreprises. Comme en 2020, lorsqu’ils ont ensemble lancé une démarche d’anticipation de sortie de crise des acteurs et actions d’intérêt général, il s’agit d’imaginer ensemble des mesures équilibrées et tenant compte des contraintes de chacun.
Pourquoi aujourd’hui ? Trois raisons l’expliquent :
- D’abord parce que Le RAMEAU publie ce jeudi 21 février le rapport conclusif « Vers de nouveaux modèles socio-économiques », 6ème étape de la démarche lancée en 2020 avec la DJEPVA, la Caisse des Dépôts et le Fonds ODD 17 pour rendre lisible, visible et accessible la capitalisation des connaissances en Commun(s),
- Ensuite, parce que ce mercredi 20 février le laboratoire de recherche est auditionné par l’Assemblée Nationale qui se questionne sur la valeur du financement public des acteurs d’intérêt général, preuve s’il en est que les Pouvoirs publics sont aussi à l’écoute des acteurs de terrain,
- Enfin, parce que pour la 1ère fois de son histoire, et malgré une solidité financière (dé)montrée, Le RAMEAU est lui aussi victime de la discrimination faite aux associations. Après Avoir investi 10 M€ au service de l’intérêt général dans la dernière décennie, vous avouerez que c’est un comble !
Ne lâchons rien ! Plus que jamais faisons la pédagogie de la preuve de la valeur des modèles d’intérêt général. Il ne s’agit pas de s’opposer à des contraintes entendables, mais de faire bouger les lignes pour faire reculer la « double peine », qu’elle soit pour les personnes en situation économique fragile, les Territoires les moins dotés en ingénierie ou les acteurs, actions et alliances d’intérêt général dont nous avons plus que jamais besoin. Ne doutons pas que le Médiateur des entreprises saura éclairer les chemins divergents pour identifier leur convergence possible.
Ensemble, créons de la valeur… en Commun(s) !
